Une image, une histoire # 6 2020
Une image :
une consigne :
Magritte avait eu vent du « Covid-19 » j’en suis sûr.
Les amants qu’il a peints en sont la preuve.
Quelle sensation peut laisser un baiser quand on respecte les « gestes barrière » ?
Imaginez donc la chose.
Tentez-la.
Puis supputez ou racontez l’effet du coronavirus sur ce baiser.
Surtout un baiser « protégé » de cette façon…
Une histoire :
Mme Muche choisit de rester cachée sous le drap. Il lui semblait qu’elle avait perdu connaissance (ou la raison ?) quelques instants et elle était tétanisée.
Mme Muche était une petite femme discrète qui n’aimait pas se faire remarquer. En aucune circonstance. Elle dormait depuis quelques mois dans cette petite pièce exiguë qui servait de débarras ; elle y avait installé le lit pliable qui servait avant, quand les jeunes venaient encore dormir à la maison. Le seul luxe de cette chambre de fortune était une petite fenêtre qui donnait sur le jardin.
Le huitième coup de coude qu’elle avait reçu en plein sommeil l’avait décidée à quitter la chambre conjugale pour ce cagibi où elle pouvait dormir profondément et surtout ronfler à sa guise. La pièce était plongée dans la pénombre et le rideau volait doucement au vent. Cette nuit-là, elle qui avait l’habitude de dormir sur le côté, se retourna et se posa sur le dos. Quelque chose dut la gêner dans son sommeil comme un moustique, une lueur car instinctivement, elle tira le drap sur son visage pour se protéger de cette agression. Quelques secondes plus tard, elle sentit une légère pression sur ses lèvres à travers l’étoffe. Elle maintint les yeux fermés. Elle sentait le souffle de la personne ce qui lui procura un flot d’émotions. Une chaleur envahit tout son corps. Son cœur se mit à battre fort, très fort. Non pas de peur ; plutôt parce qu'elle ressentait pour la première fois depuis longtemps une sensation oubliée : celle du sentiment amoureux, du désir. Elle était bouleversée par ce flot de sensations qui lui rappelaient qu’elle était femme.
L’homme, après avoir déposé un baiser, disparût comme dans un rêve. Elle resta longtemps immobile sous le drap, tour à tour, attendant, se souvenant, cherchant à calmer le feu de son corps. Combien de temps resta t’elle ainsi ? Elle ne saurait le dire. Quand elle rouvrit les yeux, le soleil se levait, éclairant la pièce. Elle souleva le drap et se leva. Elle réfléchit à ce qu’elle avait vécu ; qu’était-ce ? Un songe ? Un être réel ? Toujours est-il qu’elle n’en dirait pas un mot à M. Muche car même s’il s’était s’agit de lui, elle préférait ne pas savoir. Elle prit la décision qu’elle fermerait la porte de sa chambre ce soir. Pas la fenêtre...