Une image, une histoire # 12
Le lundi, c'est le rendez-vous chez Lakévio.
Une image :
Edward Hopper
Un texte :
Le train de 18h32 ne passera plus. Plus aucun autre train ne passera sur ces rails d’ailleurs.
L’enfant avait passé tant d’heures à les regarder défiler devant la maison. Il inventait des histoires pour chacun des trains. Il regardait les wagons filant à toute vitesse : celui-ci, le rouge, menait vers un lieu de villégiature dans la montagne ; tel autre, vert, emportait un flot de travailleurs vers la ville voisine. Tout était réglé à la minute près, dans ce flux incessant de passages, sans surprise.
Alors là, comme il savait que c’était fini, il avait le cœur gros. Il retenait ses larmes…
La catastrophe avait eu lieu quelques minutes auparavant. La gare s’était effondrée dans un terrible fracas, endommageant les rails de la voie du chemin de fer. Les dégâts étaient considérables. Heureusement, bien que proche, la maison victorienne avait été épargnée par le désastre…
Il s’en voulait d’avoir ouvert la fenêtre. Oui, tout cela était de sa faute. Si elle était restée close, on n’en serait pas là… C’était bête tout de même !
L’enfant jeta un coup d’œil méchant envers Filou le chat qui dormait paisiblement, loin de mesurer la portée des dégâts.
Sa mère posa sur lui un regard rassurant :
« Ne pleure pas : Joe va regarder ce qu’il peut faire pour remettre tout cela en état de fonctionnement. »
Il s'en voulait tant. Pourquoi avait-il voulu plus d’air, bon sang ! A peine la fenêtre ouverte, un papillon perdu s’était aventuré dans la pièce. Filou le chat, qui n’avait aucune fascination pour les réseaux ferrés mais qui en avait pour les insectes, avait traversé la table d’un bond, emportant dans sa course la gare du train électrique et quelques voies sous le regard horrifié de l’enfant.
©Véro des Rêves de Véro
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